Moutiers saint Jean

UN PEU D'HISTOIRE...

Il ne semble pas qu’on ait jamais trouvé traces d’occupation humaine sur le territoire de la commune de Moutiers Saint Jean., alors que la tradition veut que Jean de Réome soit venu s’installer dans la contrée, un désert, au VIème siècle, mais le lieu précis reste inconnu, peut-être aux alentours de Corsaint,  Ménétreux ou encore au lieu dit Sainte Marguerite. A sa mort, au milieu du VIème siècle, son corps fut inhumé à Corsaint et ce n’est qu’au cours des siècles qui ont suivi que l’abbaye fut transférée à Moutiers sur le site actuel.

Le bourg tire son nom  de l’existence  du couvent. (étymologie latine de Moutiers, qui s’écrivait encore Mostier au XVIe siècle : monasterium) .

La présence de l’abbaye entraina  la création d’un village regroupant quelques rares paysans  plus ou moins directement dépendants de l’abbaye,  des artisans, des divers corps de métiers et des membres de professions libérales, juristes, notaires… Au XVème siècle, le village s’entoura même d’une enceinte fortifiée, indépendante de celle de l’abbaye. Trois portes sont associées et délimitent pour une part, le tracé de l’enceinte. La rue de la porte aux Goths est un adonyme signalant l’une d’entre elles, disparue.  Une deuxième porte, dont il ne subsiste pas de traces non plus, s’ouvre devant l’église saint Paul. La troisième porte est conservée. Remaniée elle prend place au sud de la Grande Rue (PCR/ Drac BFC, p.91).

Après plusieurs siècles de bouleversements, dus à l’origine à la formation du système féodal, puis par la suite aux cessions et acquisitions jugées utiles à leurs intérêts par les moines, l’abbaye était propriétaire de tout ou partie des villages appartenant à la mense abbatiale.

Moutiers a payé son tribut aux guerres. L’abbaye a été occupée en 1438 par les Ecorcheurs (A. VITTENET, oc. p.86) Elle est saccagée en 1567 par les huguenots, puis prise d’assaut par les ligueurs en 1590, la voûte du clocher de l’église abbatiale est abattue pour y installer des canons et les bâtiments abbatiaux sont transformés en « maison de guerre » (A. VITTENET, op 119) et cette occupation dure jusqu’en 1594. Ce fut seulement en 1507, qu'en présence d'une dépopulation qui s'aggravait de plus en plus, Sébastien de Rabutin, cinquième abbé commendataire, se décida à affranchir les bourgeois de Moutiers-Saint-Jean au même titre que ceux de Dijon, de Semur et de Montbard, comme cela sera accordé plus tard aux habitants des villages de la terre de Saint-Jean.

En décembre 1629, l’abbaye est à nouveau assiégée par le régiment de Bussy, ce qui entraine nouvelles destructions et pillages (ibid.. p.135). Si les bâtiments ont eu à pâtir de ces évènements, la population, elle aussi, a souffert à travers la présence des militaires, le logement de la troupe, les exactions diverses, et la fourniture de milices : deux habitants de Moutiers « élus par les habitants pour être soldats en la milice de Bourgogne »  sont morts en 1636, l’un à Dole, l’autre entre Mirebeau et Dijon.

Les années 1643-1645 marquent le début du minimum de Mundler, période plus froide du « petit âge glaciaire » et qui dure au moins jusqu’en 1715. Le froid n’est pas la seule cause des mauvaises récoltes qui peuvent être aussi dues à des sécheresses, des pluies persistantes ou des étés pourris et qui sont nombreuses à cette période

L’abbaye soumise au régime de la commende, qui donnait au roi le droit de nommer l’abbé, a été rattachée à la branche mauriste de l’ordre bénédictin et a eu la chance d’être renouvelée et gouvernée par des abbés commendataires exceptionnels. Vers 1650, on  envisage de reconstruire l’abbaye et de réparer l’église abbatiale.

Le village, ayant pansé ses plaies s’agrandit vers le Nord et déborde l’enceinte vers la porte aux Goths, vers l’Ouest, les maisons bourgeoises s’agrandissent au delà de l’enceinte ; vers le Sud un nouveau quartier dit « du Château » est créé ; à l’Est, estra-muros, le jardin Coeurderoy d’inspiration italienne, est implanté.

Il reste cependant bien des misères et des souffrances à soulager et Moutiers est l’objet d’une entreprise exemplaire dans l’esprit et sous l’inspiration de Saint Vincent de Paul. Claude Charles de Rochechouart de Chandenier 86ème abbé de l’abbaye Jean de Réôme, ayant dès son arrivée, aux environs de 1650, reconnu les grandes misères et souffrances des pauvres malades « dudit Mostier sainct Jehan et des villages dépendant de la mense abbatiale, aurait, peu de temps après la prise de possession de cette abbaye, fait ériger une confrérie de Charité et a fait venir au village deux sœurs  de la Charité de Saint Lazare  pour secourir et soulager les pauvres malades. Elles sont logées chez madame Jeanne Vernot, veuve Angely et visitent les malades dans le village et aux environs. A partir de 1680, certains malades sont hébergés dans cette maison de ‘’charité’’ et un hôpital commence à exister.

MOUTIERS DEPUIS LA REVOLUTION

La révolution est le moment d’un considérable bouleversement à Moutiers. L’abbaye est supprimée, les religieux sont dispersés, les biens de l’abbaye sont vendus aux enchères ainsi que les bâtiments. Les habitants de Moutiers ont bien tenté de sauver l’église abbatiale en demandant qu’elle soit transformée en église paroissiale en remplacement de l’église Saint Paul, située hors les murs ; mais leur vœu n’a pas été satisfait.

L’hôpital fondé vers 1690 là où il est aujourd’hui, est demeuré ainsi que les sœurs qui le desservaient ; mais les fondations et les rentes qui en assuraient le fonctionnement et l’entretien ont disparu dans la tourmente. Seul sont demeurés les biens fonciers qui n’ont pas été dispersés. Le Conseil d’Administration a été considérablement modifié : c’est la municipalité de Moutiers qui a  été la base du nouveau conseil, en association avec les communes appartenant au périmètre des Terres Saint Jean, et ce nouveau conseil passe sous l’autorité du Ministère de l’Intérieur qui contrôle les délibérations et le budget. Ce conseil passera une nouvelle convention avec les sœurs de la Charité en 1844, pour remplacer celle de 1708 devenue caduque.

En 1985, les sœurs quittent l’hôpital qui devient maison de retraite, puis EPAHD.  Il est de plus en plus rattaché aux services de Santé. Le paradoxe veut qu’au moment où il est de moins en moins « hôpital » et de moins en moins « local », il soit devenu le plus gros employeur de la commune

Moutiers, autrefois fier « Bourg et Abbaye » est devenu aujourd’hui un modeste « village »  de l’Auxois. Il garde quelques témoins du passé et s’efforce de les mettre en valeur. D’autres pièces de valeur ornent le « Musée des Cloîtres » à New York, le Fogg Art Museum à Cambridge, le Musée du Louvre à Paris et plus près, le Musée Archéologique de Dijon.

Bibliographie.

Moutiers Saint Jean : 1360-1792 / AMV/GB  Recherches aux archives départementales de la Côte-d’Or et autres sources.

Collet Pierre : 1748 - La Vie de Saint Vincent de Paul,

Coste :  Saint Vincent de Paul . Correspondance, entretiens, documents.  Correspondance, publiée et annotée par Pierre Coste, prêtre de la Mission, t. I-VII. Paris, Cabalda, 1920-1922.
Région BFC : Plusieurs textes de Claudine Hugonnet-Berger.

Archives de l’Hôpital de Moutiers.

Vittenet Alfred – 1938 – L’abbaye de Moutier-Saint-Jean – Essai historique.

2021.02.25 AMV/GB

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